Sécurité

Règlements de comptes en série

Zéro policier supplémentaire pour Toulon


La décision de Christophe Castaner, Ministre de l'Intérieur, risque de provoquer un nouvel accès de colère des maires, en ces temps troublés entre manifestations des gilets jaunes et risque d'attentat de plus en plus prégnant sur l'ensemble du territoire.

En effet, début décembre, lors des décisions d'attribution de moyens supplémentaires dans les commissariats français, le Ministre a simplement accordé un policier supplémentaire pour le poste de Sanary-sur-Mer et un autre à La Seyne-sur-Mer mais aucun pour les commissariats de Toulon ! Seule bonne nouvelle, le renfort de la Police Judiciaire qui comptera 8 personnels de plus au début de l'année 2019.

Cette décision est restée relativement discrète, même si elle est officielle. Pour Frédéric Riquel, du syndicat Alliance Police : « Cette réponse n'est pas à la hauteur des attentes. Cette décision est navrante car il nous faut des moyens supplémentaires, principalement pour les services d'enquête (Police Judiciaire et Sûreté Départementale). Aujourd'hui, en PJ, le effectifs sont insuffisants. Il faudrait les doubler ce que nous réclamons depuis longtemps car les enquêtes prennent du temps et réclament du personnel. C'est la même chose pour le service de renseignements ».

Bref, le coup de gueule des maires de l'agglomération (Hubert Falco, Marc Vuillemot et Jean-Pierre Giran) n'a pas eu les effets escomptés !

MAINTENANT, CA SUFFIT !

Hubert Falco était monté en première ligne après un énième règlement de comptes, prévenant : « Maintenant, ça suffit ! Je ne laisserai pas ternir l’image de ma ville par ces voyous ».

En effet, après La Seyne-sur-Mer en septembre, une fois de plus, à Toulon, dans le quartier de Sainte-Musse, une fusillade mortelle entre bandes rivales, avait éclaté. On dénombrait un mort et de nombreux blessés. Un bilan lourd, très lourd, trop lourd !

« Combien faudra-t-il de morts pour se faire entendre », s'interrogeait, encore le maire de Toulon, très remonté contre l'absence de réaction de l’État ?

Car, suite à la fusillade mortelle entre voyous, Hubert Falco et les maires de la Métropole TPM avaient adressé un courrier officiel au Ministre de l’Intérieur pour solliciter, une fois encore, des moyens policiers à la hauteur des enjeux de la quatorzième métropole de France.

REGLEMENTS DE COMPTES EN SERIE

De leurs côtés, les syndicats de police sont sur la même longueur d'onde.

« La spirale des règlements de comptes est infernale. Car, quand on tue un voyou, c'est son frère, son père son cousin, ses amis qui cherchent à le venger. Et, c'est sans fin ! A Toulon, les voyous sont installés aux Œillets, à La Poncette, à La Closerie, à La Beaucaire. Mais, en réalité, tout cela évolue très vite. Nous sommes dans une guerre de territoire. A la PJ de Toulon, nous avons 10 policiers qui travaillent en permanence.C'est pourquoi, les effectifs civils de la police doivent être augmentés mais également les policiers en tenue pour stopper les trafics d'armes et de stupéfiants qui gangrènent ces cités », analyse Frédéric Riquel.

Il ajoute : « Aujourd'hui, comme tout est lié, même les Renseignements Territoriaux travaillent sur ces formes de délinquance. Mais pour le personnel en tenue, ce que nous réclamons, ce sont des équipements pour faire face aux armes des gangsters, principalement des fusils de guerre, avec lesquels ils peuvent tirer sur la police ».

Comme dans de nombreuses grandes villes françaises, c'est la nuit que la police est en situation de faiblesse, faute d'équipages suffisants pour patrouiller.

EFFECTIF INSUFFISANT LA NUIT A TOULON

« A Toulon, nous avons deux équipages de Police-Secours, plus des équipages en civil, mais le total fait moins de 20 policiers ! Et, après une heure du matin, nous avons encore moins d'hommes sur le terrain. Ce qui parfois, nous oblige à appeler le poste de Sanary-sur-Mer en renfort. Faute d'effectifs disponibles, il n'est pas rare d'avoir 30 appels en attente d'intervention !

A Hyères et Sanary-sur-Mer, la situation est un peu plus confortable car l'activité nocturne du commissariat est assez faible. Et, comme partout où nous le pouvons, nous travaillons en collaboration avec la Police Municipale ».

Au final, ces sous-effectifs empêchent la police de mener correctement ses enquêtes et son travail de terrain.

Un élément pourrait recentrer les policiers sur leurs missions d'urgence, en leur autorisant à prendre les plaintes de moindre importance sur rendez-vous, pratique qui existe chez leur collègues gendarmes. « Mais, la direction de la police ne le souhaite pas, prétextant que les commissariats sont ouverts 24 heures sur 24. De plus, l'Europe nous impose, désormais, de régler les heures supplémentaires et de nous accorder des repos. Mais, comment mettre ces dispositions en application dans les services d'enquête ? Il faut leur laisser le temps d'enquêter » !

RAS-LE-BOL DES ELUS

Récemment, Hubert Falco, maire de Toulon, Marc Vuillemot, maire de La Seyne-sur-Mer et Jean Pierre Giran, maire de Hyères, lançaient une sorte d'avertissement : « Sans réponse concrète et adaptée à la situation, nous en tirerons les conclusions qui s’imposent et nous n’en resterons pas là. Si nous continuons à être méprisés, si une fois encore, nous n’obtenons pas de moyens pour nos forces de police nationale, nous, les douze maires de Toulon Provence Méditerranée et ceux qui veulent nous rejoindre, nous envisageons de nous battre avec nos écharpes tricolores. Nous fermerons nos mairies s’il le faut » !

Les élus, dont le ras-le-bol est particulièrement visible, ajoutaient : « Si nous pensons bien sûr, en premier lieu, au drame et à ses terribles conséquences humaines, nous ne pouvons que nous interroger sur votre silence et sur votre absence de réponses aux multiples courriers que nous vous avons envoyés pour demander des moyens humains et matériels ! Monsieur le Ministre, nos concitoyens et nous-mêmes, nous ne comprenons plus ! Nos agents sur le terrain (dans les écoles, dans les équipements de jeunesse, ou de sports) assurent aussi courageusement leurs missions de service public dans des conditions dangereuses ! Cela ne peut plus continuer » !

Les maires de TPM faisaient ce constat amer, visiblement désemparés devant cette augmentation de la violence : « Nos policiers nationaux, qui voient leurs agresseurs libérés après une agression d’une gravité sans précédent, réalisent sur le terrain un travail remarquable dans des conditions particulièrement difficiles. Ils méritent des conditions d’exercice à la hauteur de la difficulté de leur mission. Attention, Monsieur le Ministre, quand les voyous n’ont plus peur de s’en prendre directement aux forces de l’ordre, l’État de Droit est menacé ! Il est plus que temps aujourd’hui, que notre territoire, ses policiers et nos concitoyens soient enfin entendus, considérés et dotés des moyens nécessaires pour assurer leur sécurité ».


LE SILENCE D'EMMANUEL MACRON !

Le 31 octobre 2017, les élus ont alerté le Premier Ministre et le Ministre de l’Intérieur de l’époque sur les manques de moyens humains et matériels dont souffrent les policiers nationaux sur notre territoire. Sans résultat !

Le 9 février puis le 13 septembre 2018, ils ont renouvelé cet appel auprès du Ministre de l’Intérieur ces demandes urgentes restées sans réponse !

Le 5 novembre, enfin, ils ont alerté, une fois de plus, le Ministre de l’Intérieur sur ce manque de moyens et sur les risques encourus. En vain !

« Le 13 novembre, c’est le Président de la République lui-même, de passage sur le Charles-de-Gaulle, au large de Toulon et au large des élus locaux, que nous avons interpellé sur ce sujet ! Ce même Président qui écrit à tous les maires de France en précisant qu’en matière de sécurité publique, l’État sera au rendez-vous pour accompagner chaque commune. Constatons que pour notre territoire, ce rendez-vous est un rendez-vous plus que manqué !

À ces multiples courriers et sollicitations, nous n’avons reçu aucune réponse concrète », s'indignait l'ancien ministre !

Propos recueillis par Gilles CARVOYEUR

 

 

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