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BTP varois

Jean-Jacques Castillon, président : « Les corps intermédiaires sont en passe d’être réhabilités »

Pour Jean-Jacques Castillon, le président de la Fédération du BTP varois : « Cette année, lorsque nous avons organisé nos Rencontres de la Construction sur les 50 ans de mai 68, nous étions loin de penser que 6 mois plus tard nous serions dans un climat quasi-insurrectionnel dans la France de fin 2018 ».

Le président ajoute : « Il faut croire que sans appeler à la révolution, nous avions perçu un terrain propice à la grogne sociale.

Rappelez-vous ! Nous avions évoqué les évolutions de notre environnement comme particulièrement déstabilisantes et le changement de paradigme économique comme un nouveau monde où il nous fallait prendre de nouveaux repères. J’avais évoqué la révolution permanente à laquelle nous étions confrontés et qui se révélait à travers plusieurs enjeux.

Il y avait l’enjeu lié au numérique. L’accélération de la numérisation de nos vies et de nos entreprises porte le risque de les voir se désincarner si l’on n’y prend pas garde. Il y avait également les enjeux environnementaux pour lesquels nous continuons d’être confrontés à de grandes contradictions que ce soit pour la gestion des déchets de chantiers ou encore pour relever le défi de la transition énergétique ».

LA DOUBLE INJUSTICE DU TRAVAIL ILLEGAL

Jean-Jacques Castillon fait cette analyse : « Il y avait enfin les enjeux sociétaux liés notamment à la dimension humaine de nos activités.

J’avais à l’époque alerté sur la lassitude qui était la nôtre de subir la double injustice du travail illégal (nos entreprises sont les premières victimes de cette concurrence déloyale et sont pourtant exagérément contrôlées) et la lassitude aussi de ne pas être entendus sur l’apprentissage après plus de 13 ans d’acharnement puisque la Région ne semble finalement pas vouloir donner suite à son engagement de rénover le CFA de Toulon et de créer son annexe à Draguignan.

J’avais alors indiqué que notre résilience avait ses limites. Sans partager les mêmes modes d’expression, il semble que nous partagions cette caractéristique avec certains de nos concitoyens qui ne se sentent pas reconnus ni considérés dans ce qu’ils sont ou ce qu’ils font ».

AGGRAVATION DE LA FRACTURE TERRITORIALE

Pour le président départemental de la filière : « Il n’est alors pas étonnant de voir cette grogne, cette désespérance s’exprimer ouvertement. Il ne m’appartient pas de juger cette colère ni la façon dont elle s’exprime, même si vous devinez aisément que je préfère largement la négociation par le dialogue et la pédagogie à celle des ronds-points.

Toutefois, il y a parmi les gilets-jaunes des personnes de toutes conditions qui souffrent : des chômeurs, des retraités, des parents isolés mais aussi très certainement des artisans et des dirigeants de petites entreprises.

Tous expriment leur désarroi face à une situation qui leur échappe et qui est le résultat de plusieurs décennies de politiques qui ont contribué à aggraver la fracture territoriale et sociale ; en résumé, des politiques défavorables à une France moyenne, péri-urbaine et rurale qui se sent oubliée et sacrifiée.

Comme vous tous ici je suppose, je souhaite que les propositions du Président de la République sauront rapidement trouver un écho favorable auprès de cette population pour que le calme revienne et qu’une certaine sérénité soit restaurée.

Toutefois, tout cela doit nous faire réfléchir. En particulier sur le mode d’expression utilisé par les gilets-jaunes qui s’affranchit des formes traditionnelles de représentation, en l’occurrence les syndicats dont je n’exclus pas notre organisation professionnelle, notre Fédération, loin s’en faut !

Il nous faut analyser cette crise de la représentation qui frappe les corps intermédiaires, dont nous faisons partie. Une large part de nos concitoyens leur préfèrent désormais les réseaux sociaux qui assurent une visibilité immédiate et à très grande échelle pour peu que l’on sache y faire. A chacun son quart d’heure de célébrité et plus besoin de porte-paroles ».

RAFFINERIE DE LA COLERE

Le président du BTP du Var constate : « Le Premier ministre lui-même a fait son choix. Au lendemain de la manifestation du 17 novembre à Paris, il a prononcé cette phrase explicite : « les syndicats je les respecte. Mais ce que les Français demandent, ce sont des résultats ». C’est donc un fait acquis, élaborer des solutions avec les corps intermédiaires serait contre-productif.

Mais du coup, à privilégier une relation directe et verticale avec la population, nos gouvernants s’exposent à de la colère brute. Or, si la colère peut se révéler une énergie sociale et politique, elle reste vaine tout comme le pétrole si elle n’est pas raffinée : rien n’avance au pétrole brut pas plus que la société n’avancera avec de la colère brute.

La raffinerie de la colère, ce sont les corps intermédiaires qui procèdent au tri, à la hiérarchisation et à la rationalisation des revendications. Ils jouent pleinement leur rôle d’institutions de l’interaction lorsqu’ils transforment les démarches individuelles en combats pour l’intérêt général.

C’est là toute la noblesse du lobbying que je m’efforce de réhabiliter depuis le début de ma présidence en rappelant que négocier c’est avant tout faire de la pédagogie pour expliquer à son interlocuteur ou opposant ce qu’il ne sait pas de vous et de vos problèmes !

Ce qui doit nous rassurer, c’est la façon dont les corps intermédiaires sont en passe d’être réhabilités à la faveur du projet de refonte du pacte social de la France annoncé par le Président de la République. Nous verrons prochainement les modalités de sa mise en oeuvre en 2019 et si le pays se donne vraiment les moyens des ambitions que la situation exige.

Un dernier mot pour conclure sous forme d’annonce. Je pense que dans les moments de grande confusion comme celui que nous connaissons plusieurs semaines, il faut savoir remettre un peu de concorde pour faire bonne mesure. Ne dit-on pas que c’est dans la concorde que les grandes choses s’accomplissent ? C’est ce que je vous propose : tout simplement faire corps et promouvoir l’unité là où elle doit s’exercer ».

RASSEMBLER LA GALAXIE DU BTP

Jean-Jacques Castillon conclut : « Cette année, je proposerai une version enrichie de nos traditionnels vœux du BTP varois. Une version plus œcuménique (je n’ai pas parlé de vœux UBI ET ORBI !) qui réuniront tous les acteurs institutionnels du BTP. Ces vœux du monde de la construction rassembleront toute la galaxie du BTP. Soyez au rendez-vous ! Sur la forme, nous n’aurons plus que deux rendez-vous, un à l’est et l’autre à l’ouest du département.

L’objectif sera de rassembler davantage et faire sens et cause commune en ces temps parfois troublés qui pourraient ébranler notre foi dans le collectif.

Ne nous laissons pas abattre. Continuons à fédérer !

Je vous remercie et vous souhaite une bonne année 2019 à tous ».

Jean-Jacques Castillon,
Président du BTP 83

Photo Michel CALMON

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